Critique littéraire de ReadTrip à propos de La dernière tempête - Ragnar Jonasson
Ça y est, avec "La dernière tempête" je clos la trilogie autour du personnage d’Hulda et si j’ai globalement apprécié tous les tomes, celui-ci est pour moi le plus réussi. Ce qui est étonnant, c’est que pour autant, pour moi c’est sûrement celui des trois tomes qui est le moins estampillé "roman policier". En effet, même si l’on retrouve Huda qui est toujours flic à Reykjavik, finalement, on la suit surtout dans sa vie personnelle et j’ai même envie de dire qu’on ne la voit enquêter grosso modo que dans les 50 dernières pages. Mais cela n’est pas dérangeant, bien au contraire ! Ce tome permet enfin d’en savoir plus sur cette femme dont on avait seulement entr’aperçu le passé dans les tomes précédents.
Pour rappel, cette trilogie est écrite dans une logique antéchronologique puisqu’au fur et à mesure des tomes, on remonte dans la vie d’Hulda et c’est une vraie originalité que j’ai beaucoup appréciée et qui en plus de ça fonctionne ! En effet, cela permet de ménager le suspense quant au passé d’Hulda, ce qui fait qu’elle est devenue celle qu’elle est dans le premier tome et c’est une construction que je n’ai encore rencontrée dans aucune autre saga.
Dans "La dernière tempête", comme je le disais, on est plus pour moi dans un roman noir et vaguement un thriller psychologique, bien plus que dans un roman policier classique. Pendant un bon moment, on oscille entre des passages dans lesquels on suit Hulda dans sa vie personnelle avec les difficultés qu’elle rencontre au sein de son foyer et de l’autre, on va suivre un couple qui vit en vase clos dans une région reculée d’Islande, à la période des fêtes de fin d’année et qui va ouvrir sa porte à un homme qui s’est perdu.
J’ai beaucoup aimé cette partie en huis clos, à l’ambiance bizarre et glaçante à souhait. Je trouve que Ragnar Jonasson a particulièrement bien réussi à nous transmettre les difficultés que les Islandais peuvent rencontrer au quotidien, dans ce pays au froid dévastateur, dans lequel certaines habitations sont totalement isolées une partie de l’année et dans lequel le manque de soleil à certaines périodes peut plonger les habitants dans une sorte de déprime générale. En lisant ces passages, j’avais froid, je ressentais l’isolement et la détresse de ces gens et cela était particulièrement appréciable en termes de lecture. D’autant qu’au fur et à mesure, l’ambiance dans cette ferme isolée se fait de plus en plus pesante et suspicieuse jusqu’au dénouement que j’avais en partie vu venir (car cela m’a rappelé un autre livre que j’ai lu) mais qui surprendra probablement les lecteurs assez peu habitués à ce genre de lecture.
Concernant les chapitres autour de Hulda, je les ai appréciés pour ce qu’ils m’ont apporté de compréhension sur ce personnage, mais parfois, je trouvais certains passages un peu redondants. Là encore, certaines scènes sont prévisibles (d’autant plus en ayant lu les tomes précédents qui nous racontent donc la suite de sa vie). Cependant, c’était agréable d’avoir enfin quelques éclaircissements sur sa vie familiale même si je pense qu’à ce sujet, l’auteur aurait dû beaucoup plus s’épancher et creuser la situation. Pour moi, il est trop resté en surface concernant le tournant de la vie d’Hulda alors que cela soulève des thématiques lourdes et qui auraient pu être très intéressantes.
C’est dommage, mais c’est un reproche que je fais de façon globale dans les romans de Ragnar Jonasson. Ses histoires ne sont pas mauvaises, mais elles mériteraient d’être plus denses. "La dernière tempête" est donc un bon roman noir/thriller psychologique dans lequel il est beaucoup question de la famille et qui clôt parfaitement la trilogie. C’est un roman à l’ambiance pesante, parfait pour la période de l’automne et de l’hiver, qui se dévore à vitesse grand V. En effet, les alternances de chapitres, de narrations ainsi que les chapitres généralement courts font qu’en tant que lecteur, on fait très vite défiler les pages, comme une plongée en apnée dans le froid et la solitude islandaise dont on est heureux de sortir à la fin pour respirer un grand coup.
Je ne suis toujours pas une fan inconditionnelle de Ragnar Jonasson car pour moi c’est globalement un auteur trop léger dont la plume mériterait à gagner en complexité et en profondeur mais si vous avez envie de tenter des romans islandais accessibles et entraînants tout en étant embarqué dans le décor islandais alors je pense que c’est une très bonne porte d’entrée. J’aurais du mal à dire dans quel ordre il est préférable de lire cette trilogie. Quand je repense aux trois romans dans leur globalité, je me dis que si l’auteur a choisi de les écrire dans cet ordre, c’est qu’il doit y avoir une raison (et effectivement cela fonctionne et apporte de l’originalité) mais pour autant, je trouve que de les lire dans l’ordre chronologique (et donc inverse de leur parution) ne serait pas non plus dénué d’intérêt.
En tout cas pour moi, quel que soit l’ordre, le meilleur tome reste "La dernière tempête". Est-ce parce que les thématiques m’ont plus touchées ou parce que l’enquête était moins importante et le réalisme plus présent ? Sûrement. Toujours est-il que même si ce livre est loin d’être parfait, car certains éléments sont prévisibles et que globalement, il n’est pas d’une originalité folle, il m’a néanmoins fait passer un très bon moment de lecture et m’a permis de clôturer une trilogie en beauté !
NOTA BENE
L’avis de la rédaction est purement personnel et nous ne prétendons en aucun cas que cette critique littéraire soit à prendre comme une vérité absolue. Nous vous invitons donc à laisser votre propre critique dans les commentaires et à noter ce livre afin d’avoir un avis général représentant au mieux la foule des lecteurs.
Ajouter un commentaire