Oxymort - Franck Bouysse

"Oxymort" m’a franchement déroutée parce que comme lors de ma lecture de "Orphelines", j’ai eu du mal à y retrouver la patte de Franck Bouysse. J’ai compris qu’il avait voulu tenter autre chose et j’ai retrouvé certains aspects de son écriture, mais je ne peux dire qu’il m’a totalement conquise comme c’est très souvent le cas avec ses romans tels que "Plateau", "Grossir le ciel" ou encore "Né d’aucune femme".

Dans ce titre-ci, sa plume s’est fait peut-être moins poétique et moins fine pour aller plus à l’essentiel, plus dans le ressenti, dans l’instinctif et le viscéral. On a un récit à plusieurs voix, raconté de plusieurs points de vue un peu comme un patchwork de plusieurs vies qui s’entremêlent, mais un récit toujours très intimiste, très immersif. On est vraiment plongé dans le ressenti des personnages, dans leurs souvenirs, dans leurs petites manies et pour ça, on a bien souvent des phrases courtes voire très courtes, presque jetées comme des idées qui fusent sans prendre le temps de les réfléchir. C’est en ce sens que je trouve que l’écriture de Franck Bouysse s’est ici fait très instinctive et traduit vraiment un sentiment d’immédiateté et de vivant qui n’est pas inintéressant du tout, mais qui dénote, je trouve, avec ce qu’il a l’habitude de faire.

Quant à l’histoire en elle-même et aux sentiments ainsi qu’à la psychologie des personnages, je trouve qu’il aurait pu aller beaucoup plus loin. Je suis ressortie de cette lecture avec un manque, avec l’idée qu’il aurait pu pousser les choses bien plus loin et que ce roman manquait peut-être de finitions. C’est dommage parce que j’ai vraiment apprécié le fond, cette histoire d’amours contrariés, d’amours parfois imagés et finalement, de ce que ce sentiment amoureux peut apporter de plus beau comme de plus terrible. Avec une telle thématique, il y avait moult choses à dire.

Je me serais presque par moments crue dans une tragédie inspirée par du Shakespeare, mais il m’a manqué quelque chose. Peut-être un peu plus de profondeur et un peu plus de liant et puis comme je l’ai dit, j’ai certainement aussi été déstabilisée par cette écriture de Franck Bouysse que je ne lui connais pas forcément. Je l’ai déjà dit et à ce jour, je continue à le penser, je ne trouve l’auteur jamais aussi bon et je ne l’apprécie jamais autant que lorsqu’il se lance dans ses romans noirs ruraux. C’est vraiment le style dans lequel il me touche plus, et même si je suis toujours curieuse de le découvrir dans autre chose et que je comprends qu’il ai peut-être envie de tenter d’autres styles, pour ma part, ça ne me convainc pas autant que ses romans noirs ruraux.

Malgré tout, j’ai une fois de plus senti cette capacité de l’auteur à mettre à nu l’humain, à aller décortiquer les travers des uns et des autres et à installer une ambiance angoissante et sombre qui pique la curiosité tout en étant dérangeant. Je continue à aimer découvrir ses romans, j’ai toujours autant envie de lire tous les livres de Franck Bouysse, mais je ne peux dire autre chose que j’ai ressentie une petite déception en lisant "Oxymort" et que ce ne sera vraiment pas son titre le plus réussi pour moi.