Trouver l'enfant - René Denfeld

J’ai déjà lu beaucoup de romans policiers et thrillers et pas mal d’ailleurs autour de la thématique de la disparition de l’enfant, mais malgré cela, René Denfeld a su me proposer une histoire que j’ai trouvé originale que ce soit dans la forme ou dans le fond. En effet, bien qu’il s’agisse d’une enquête autour de la disparition d’une petite fille, je trouve que l’auteure a abordé cette thématique avec beaucoup d’originalité. Cela est principalement dû au fait que les recherches ne soient pas menées par des policiers (ou pas seulement) mais par une femme qui a elle-même vécu un kidnapping durant son enfance. Et ce personnage de Naomi donne vraiment toute sa dimension au roman. 

"Trouver l’enfant" est un roman très intimiste, dans lequel pratiquement en permanence, on est aux côtés de Naomi. On suit avec elle les infimes traces qui peut-être la mèneront à quelque chose, ses questionnements, ses doutes mais aussi ses souvenirs durant son enfance après sa libération puisqu’elle ne se souvient de rien de sa vie d’avant. On se retrouve du coup avec un personnage central très énigmatique, dont on ne peut tout savoir, car elle-même ne connaît pas son passé. On sent tout du long qu’elle reste profondément façonnée par ce qu’elle a vécu, pour le meilleur et pour le pire. On suit un personnage central qui est loin d’être commun et qui est donc pour moi, l’intérêt premier de ce roman. 

J’avoue que pendant une bonne première moitié du livre, j’ai eu du mal à m’attacher à elle. Elle m’intriguait, mais n’arrivait pas à me toucher. Et puis petit à petit, je l’ai de plus en plus apprécié. Je pense que de découvrir sa relation très douce, tendre et pudique avec sa mère adoptive, mais également avec Jérôme, m’a beaucoup aidé pour cela. 

Attention par contre, bien que l’on soit dans une enquête, le rythme est assez lancinant. Naomi s’imprègne des lieux, de l’atmosphère, elle tâtonne et donc forcément, en tant que lecteur, on piétine un peu avec elle. Malgré tout, comme entre deux nous avons d’autres chapitres dans lesquels on suit une petite fille captive, cela permet de créer une sorte de dynamique et de maintenir l’envie de démêler cette pelote de laine. L’écriture de René Denfeld peut sembler parfois un peu déroutante, un peu froide, mais je l’ai trouvé très belle, très travaillée et très juste. 

Bien que dans ce "Trouver l'enfant" elle aborde l’une des pires atrocités possibles, puisque l’on y parle de violences physiques, psychologiques et sexuelles sur des enfants, elle arrive, je trouve à contrebalancer ces horreurs avec une écriture douce, pudique et parfois même un peu onirique. Jamais elle ne parle crûment des sévices subis et elle mêle beaucoup à cette histoire des contes et légendes ce qui permet d’adoucir un peu l’ensemble. Bon en tant que maman, je reconnais que malgré tout, certains passages ont été très durs à lire (comme par exemple le passage dans le bus) mais j’ai aimé la façon dont elle a traité son sujet. Comme si elle avait de par son écriture respecté ces enfants qui ont subi le pire quand d’autres auteurs sont parfois plus crus voire même trash en parlant de ces thématiques et cela donne parfois la sensation de rajouter à l’horreur de ces enfants. 

J’ai absolument adoré la fin. Une fin tout à fait satisfaisante et poignante qui m’a serré la gorge et qui en plus de cela annonce subtilement ce qui sera le sujet du tome suivant que j’ai d’ailleurs hâte de découvrir lorsqu’il sera publié en poche. Je tiens donc une fois de plus à préciser que "Trouver l’enfant" n’est pas à lire si vous cherchez un roman à suspense avec une enquête haletante et une fin surprenante. Ce n’est pas du tout ainsi que l’auteure a construit son histoire et la petite révélation à la fin est, je trouve amenée progressivement par le biais de petits détails de sorte que ce n’est pas vraiment une surprise. 

"Trouver l’enfant", c’est un roman sur l’instinct (que ce soit l’instinct de survie ou l’instinct d’enquête), la force morale, la reconstruction, la lumière au bout du tunnel, mais aussi l’horreur de la pédophilie. C’est un roman à l’ambiance glaciale, qui donne parfois l’impression de ressentir l’humidité et le désespoir nous transpercer. Si j’ai parfois regretté quelques lenteurs et si j’avoue que j’aurais aimé m’attacher plus rapidement à Naomi, malgré tout, cela reste pour moi une très bonne lecture.

J’ai découvert une plume originale qui je pense ne plaira pas à tout le monde, mais qui a su me toucher. Une parenthèse glaçante, sombre et un peu stressante que j’ai aimé faire et qui me donne envie de retrouver à l’occasion l’univers de René Denfeld. Une belle découverte pour ma part.